Cette visite qualifiée de "rattrapage" selon M. Sonko, visait à relancer la coopération décentralisée initiée le 4 septembre 2018 entre Bouaké et Ziguinchor, une ambition qu'il nourrissait déjà en tant que maire de Ziguinchor.
A son arrivée à Bouaké, il a été accueilli par une foule en liesse massivement composée de la diaspora sénégalaise de Bouaké et de toute les composantes des couches sociales de la ville et de la région.
Au cours des échanges tenus dans les locaux de l’hôtel de ville, le Premier ministre Ousmane Sonko a exprimé à plusieurs reprises son souhait de se rendre à Bouaké, un désir entravé par des contraintes politiques lorsqu'il était maire de Ziguinchor.
C'est pourquoi, dès la planification de sa tournée sous-régionale en tant que Premier ministre, il a insisté pour inclure cette étape ivoirienne.
Ce déplacement s'inscrit dans la continuité d'une coopération entre les deux villes, caractérisée par des similitudes notables entre la région de Gbêkê et la Casamance, tant sur le plan géographique que culturel.
Ousmane Sonko a également réaffirmé son intention de dynamiser cette collaboration, la considérant comme un levier pour l'intégration des peuples, avant même celle des États. Il a d'ailleurs souligné l'intérêt de Ziguinchor à s'inspirer du programme "Bouaké Nouveau".
Au cours de sa visite, il a été intronisé roi de Bouaké sous le nom de Nana Koua Gbêkê II, recevant les clés de la ville et les symboles de la municipalité.
Le modèle "Bouaké Nouveau" en ligne de mire
Le ministre Amadou Koné, maire de Bouaké, a présenté au Premier ministre sénégalais les atouts de son programme "Bouaké Nouveau".
Il a expliqué comment la ville a retrouvé son dynamisme grâce à des investissements publics massifs de plus de 400 milliards FCFA au cours des cinq dernières années.
Une gouvernance locale en constante amélioration ayant permis d'obtenir la confiance des bailleurs de fonds et du secteur privé, un plan quinquennal de développement inclusif, et l'engagement citoyen manifesté par la mise en place d'une Assemblée citoyenne, ont aussi favorisé ce positionnement.
Le succès du forum "Invest in Bouaké", qui a généré 816 milliards FCFA d'intentions d'investissement, a également été mis en avant.
Le maire Amadou Koné a souligné la volonté de Bouaké d'approfondir sa coopération avec Ziguinchor, notamment dans des secteurs clés tels que l'agriculture durable et la sécurité alimentaire, l'amélioration de la gouvernance locale, l'économie circulaire, les industries culturelles et créatives, le développement humain, et la protection de l'environnement.
Il a également salué le "Plan Diomaye pour la Casamance", initié par le gouvernement sénégalais, et a réaffirmé son intention de poursuivre la coopération décentralisée avec le maire actuel de Ziguinchor, Djibril Sonko.
Cette approche collaborative vise à mutualiser les expériences de reconstruction et d'innovation, tout en renforçant les échanges d'expertises en matière de gouvernance locale.
La coopération décentralisée entre Bouaké et Ziguinchor : un modèle pour l'intégration régionale
Le partenariat entre Bouaké et Ziguinchor illustre plusieurs principes clés qui peuvent être adaptés à d'autres contextes africains. D’abord, la volonté politique locale forte, l’identification de similitudes et de défis partagés. L'initiative vient des élus locaux qui voient un intérêt direct et concret pour leurs populations, ne dépendant pas des aléas des relations diplomatiques nationales. Les villes reconnaissent des histoires, des cultures et des défis similaires, facilitant ainsi la compréhension mutuelle et la définition d'objectifs de coopération pertinents.
Ensuite, des échanges d'expertises et de bonnes pratiques. A ce propos, Bouaké, avec son programme "Bouaké Nouveau" et le succès de son forum "Invest in Bouaké", offre un modèle de résilience et de développement économique. Cet échange d'expériences est un pilier de la coopération.
Des projets concrets et mutuellement bénéfiques peuvent être expérimentés. La coopération vise des actions tangibles dans des domaines définis comme l'agriculture durable, l'économie circulaire, la culture, le commerce, l'éducation ou la protection de l'environnement.
Enfin, l’implication des populations et des acteurs locaux, ainsi que la continuité et la pérennisation doivent occuper une place de choix. Au-delà des administrations, la coopération doit impliquer les communautés, les universités et les entreprises. C'est ce qui renforce l'intégration "entre les peuples avant l'intégration des États".
Malgré les changements politiques, la volonté de poursuivre la coopération est affirmée, assurant la durabilité des initiatives.
Ce modèle peut être répliqué en Afrique en encourageant le jumelage actif, la mutualisation des ressources et des connaissances, le renforcement des capacités locales, le développement de plateformes d'échanges et l'intégration des diasporas. Il promeut également la diversité culturelle et le dialogue intercommunautaire, utilisant la coopération décentralisée comme un outil pour briser les préjugés et célébrer les richesses culturelles partagées.
En somme, la coopération entre Bouaké et Ziguinchor démontre qu'une approche locale et participative, avec un fort engagement des acteurs territoriaux, est un puissant moteur pour une intégration africaine plus profonde et plus résiliente, ancrée dans la fraternité des peuples.
Avant de quitter Bouaké, le premier ministre Ousmane Sonko a visité outre les installations de l’hôtel de ville, le stade de la paix et le grand marché en construction et échangé avec la forte colonie sénégalaise de Bouaké.
M. Sonko a entamé une tournée ouest-africaine l'ayant déjà mené à Banjul, Nouakchott, Bamako et Ouagadougou. Il quittera Abidjan ce dimanche pour poursuivre sa tournée à Conakry (Guinée) et à Freetown (Sierra Leone).
Bouaké, une intégration réussie des peuples et un modèle pour Ziguinchor
Publié le dimanche 1 juin 2025